Afrique

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Rapport Régional. Afrique

1 Synthèse

La troisième édition du Baromètre des données ouvertes (ODB pour Open Data Barometer) de la World Wide Web Foundation, publiée en avril 2016 et couvrant 92 pays, classe les nations selon trois critères relatifs aux données ouvertes:

  • La préparation: Dans quelle mesure les gouvernements sont-ils préparés pour les initiatives concernant les données ouvertes ? Quelles sont les politiques existantes ?
  • L’implémentation: Les gouvernements mettent-ils en pratique leurs engagements ?
  • L’impact: Les données gouvernementales ouvertes sont-elles utilisées de manière à apporter des bénéfices concrets ?

Dans ce rapport régional, nous approfondissons les résultats du Baromètre pour étudier plus attentivement la performance de 21 pays d’Afrique subsaharienne apparaissant dans la dernière édition. L’objectif de cette analyse régionale est d’utiliser les précieuses données pour examiner les progrès réalisés en matière de données ouvertes en Afrique, évaluer la volonté des gouvernements africains à permettre l’accès aux données ouvertes et prendre en compte les potentiels bénéfices de leur utilisation pour les citoyens.

Les résultats de l’ODB 2015 montrent que l’Afrique accuse un retard par rapport aux autres régions dans l’utilisation et l’impact des données ouvertes. Aucun pays d’Afrique subsaharienne ne se classe parmi les 40 premiers, alors que six d’entre eux figurent dans les dix derniers. Globalement, il y a toujours beaucoup de travail à faire : seuls 10 % des 1380 jeux de données analysés étaient ouverts. Plus alarmant, seuls deux de ces jeux de données provenaient d’Afrique.

Note relative à la liste des pays figurant dans ce rapport:.Ce rapport se concentre exclusivement sur les pays subsahariens de la troisième édition du Baromètre des données ouvertes : l’Afrique du Sud, le Bénin, le Botswana, le Burkina Faso, le Cameroun, l’Éthiopie, le Ghana, le Kenya, le Malawi, le Mali, l’île Maurice, le Mozambique, la Namibie, le Nigeria, le Rwanda, le Sénégal, la Sierra Leone, la Tanzanie, l’Ouganda, la Zambie et le Zimbabwe. Dans ce rapport, toute référence à « l’Afrique » renvoie à l’ensemble des pays d’Afrique subsaharienne cités précédemment. Le choix de ces pays a uniquement été effectué à des fins analytiques. Les trois pays africains qui ne sont pas inclus dans ce rapport (l’Égypte, le Maroc et la Tunisie) sont regroupés, pour des raisons analytiques, avec le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, dans l’explorateur de données, disponible sur le site Internet du Baromètre des données ouvertes.”

La question dépasse largement l’évaluation des performances à l’échelle des pays. En matière de développement, les données sont devenues une cause défendue aussi bien par les activistes de terrain que le Secrétaire Général de l’ONU. Il existe désormais une compréhension parfaite de la nécessité d’avoir des données fiables pour atteindre les objectifs mondiaux de promotion de la démocratie et du développement.

L’année dernière ont été définis les Objectifs de développement durable (ODD) — 17 engagements à l’échelle mondiale qui établissent un programme ambitieux pour mettre fin à la pauvreté, lutter contre les inégalités et s’attaquer au changement climatique d’ici 2030. Reconnaissant que des données de qualité sont essentielles pour atteindre ces ODD, le Global Partnership for Sustainable Development Data et l’International Open Data Charter ont été lancés alors que les ODD étaient dévoilés. Pendant ce temps, l’Afrique adoptait l’African Data Consensus, une feuille de route pour améliorer les standards et l’accessibilité des données à travers le continent. S’il a beaucoup été fait mention du besoin de données de qualité et en plus grand nombre pour atteindre les ODD, le Baromètre de cette année suit l’exemple mis en place par l’International Open Data Charter en se concentrant sur la disponibilité de ces données pour le public.

Les inégalités et la pauvreté ne sont pas uniquement liées au revenu. C’est également une question d’information. Sept ans après ma première demande auprès des gouvernements pour qu’ils ouvrent leurs données à tous, des initiatives relatives aux données ouvertes sont désormais en place dans plus de la moitié des pays que nous suivons. Pourtant, leur qualité est variable et les bénéfices sont concentrés dans les pays riches. Il est temps d’alimenter et de mettre en place des données ouvertes dans le monde, grâce à des projets comme l’International Open Data Charter.”

— Tim Berners-Lee, commentant les conclusions de la 3e édition du Baromètre des données ouvertes.

2 Conclusions principales

Dans ce rapport, nous nous sommes concentrés sur les tendances émergentes dessinées par les données du Baromètre en Afrique. Alors que certaines des observations peuvent être généralisées au niveau régional, nous encourageons chaque pays africain à étudier ses performances pour libérer le potentiel des données ouvertes pour le développement du continent. En observant les tendances, nous avons identifié cinq conclusions principales.

  • 1La performance sur le continent est relativement faible de manière générale et en comparaison avec les pays émergents du Sud
Classement Pays Groupe de revenu* Résultat
42 Kenya intermédiaire (inférieur) 29.87
46 Rwanda faible 27.55
47 Afrique du Sud intermédiaire (supérieur) 26.77
53 Île Maurice intermédiaire (supérieur) 22.33
67 Nigéria intermédiaire (inférieur) 14.13
69 Tanzanie faible 10.77
70 Sénégal intermédiaire (inférieur) 10.33
70 Ghana Lower middle 10.19
70 Burkina Faso faible 10.12
70 Ouganda faible 9.92
76 Bénin faible 8.47
76 Mozambique faible 8.14
78 Malawi faible 7.39
78 Namibie intermédiaire (supérieur) 7.35
78 Ethiopie faible 6.63
78 Cameroun intermédiaire (inférieur) 6.57
78 Botswana intermédiaire (inférieur) 6.51
86 Sierra Leone faible 5.45
86 Zambie intermédiaire (inférieur) 4.91
88 Mali faible 3.98
90 Zimbabwe faible 3.38

Tableau 1a : Classement des pays pour le Baromètre des données ouvertes – 3e édition (Afrique subsaharienne)
* Groupe de revenu = World Bank Country and Lending Groups, 2016,

Classement Pays Résultat
16 Mexique 61.76
47 Afrique du Sud 26.77
53 Île Maurice 22.33
78 Namibie 7.35
78 Botswana 6.51

Tableau 1b : Classement des pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure, comprenant le premier pays du Sud dans cette catégorie (en gras).

Classement Pays Résultat
36 Philippines 36.94
42 Kenya 29.87
67 Nigéria 14.13
70 Sénégal 10.33
70 Ghana 10.19
78 Cameroun 6.57
86 Zambie 4.91

Tableau 1c: Classement des pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure, comprenant le premier pays du Sud dans cette catégorie (en gras).

Classement Pays Résultat
46 Rwanda 27.55
68 Népal 13.09
69 Tanzanie 10.77
70 Burkina Faso 10.12
70 Ouganda 9.92

Tableau 1d : Classement des pays à faibles revenus, comprenant le premier pays du Sud dans cette catégorie (en gras)

Le tableau 1a indique que le pays d’Afrique subsaharienne le mieux classé dans la 3e édition du Baromètre est le Kenya, classé 42e sur 92 pays. Cependant, le Kenya ne publie pas un seul jeu de données complètement ouvertes. En effet, les données relatives à la santé, à l’éducation et à la législation sont sous licence libre mais ne pourraient être qualifiées de complètement ouvertes puisqu’elles ne sont pas disponibles en masse. En position 46, le Rwanda est le seul autre pays africain figurant dans la première moitié de ce classement. Le pays est en voie d’amélioration (voir figure 2) et défie le Kenya pour la première place dans les classements régionaux.

Le Rwanda se place en tête du classement mondial pour les pays à faible revenu, avec un score de plus du double de celui du Népal, en deuxième position (tableau 1d). Comparés aux pays de la même catégorie de revenu, les autres pays africains ne sont pas aussi bien classés que les pays d’Amérique latine ou d’Asie. Le pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure, le mieux classé en dehors de l’Afrique est les Philippines. Parmi les pays africains à revenu intermédiaire, tranche inférieure, seul le Kenya se rapproche du résultat des Philippines (tableau 1c). Le Mexique est le premier pays non africain de l’hémisphère sud dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure. Le résultat du Mexique est plus de deux fois supérieur à celui du premier pays africain dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure, à savoir l’Afrique du Sud (tableau 1b). Cela montre que même avec des ressources limitées, de nombreux pays à travers le continent pourraient faire plus pour adopter et mettre en place des données ouvertes.

  • 2Une tendance décroissante bien trop commune parmi les résultats généraux du Baromètre entre 2013 et 2015

Figure 1 : Évolution des résultats généraux entre la 1re et la 3e édition du Baromètre des données ouvertes pour les pays africains

La figure 1 montre que neuf des pays africains (50 %) pour lesquels les données étaient disponibles présentent une amélioration dans leur résultat général au Baromètre entre la première édition et l’édition actuelle. Cependant, cette amélioration est très faible pour sept pays et, à l’exception du Nigeria et de l’Afrique du Sud, l’amélioration est marginale. Les deux seuls jeux de données parmi les 10 % à être totalement ouverts viennent du Nigeria. Cela explique la montée du Nigeria dans les classements. Cela suggère également que dans les autres pays africains peu d’efforts sont faits pour publier des données complètement ouvertes.

L’autre moitié des pays présente une diminution de leurs résultats généraux dans le Baromètre entre la première édition et l’édition actuelle. Concernant la tendance décroissante des résultats du Baromètre pour ces neuf pays, les diminutions sont généralement prononcées. Une analyse des changements du résultat médian par région montre qu’en Afrique et dans les régions similaires du monde, la tendance est à une diminution générale du score médian, particulièrement en Asie du Sud (tableau 2a). En fait, l’Afrique se compare avantageusement aux autres régions du monde, bien qu’il y ait un déclin dans les résultats médians des quatre régions. La performance de l’Afrique est similaire à celle des autres régions même en excluant les pays à revenu élevé pour effectuer une comparaison plus équitable (tableau 2b). Cela confirme la conclusion du Rapport mondial énonçant que l’implémentation et l’impact des engagements pris en matière de données ouvertes sont en retard, tandis que la disponibilité et la capacité des données ouvertes restent largement concentrées dans les pays riches, où les scores augmentent. L’introduction de deux nouveaux indicateurs pourrait expliquer des résultats moyens décevants dans la 3e édition du Baromètre et une analyse approfondie devrait être effectuée.

1re édition2013 3e édition 2105 Évolution (%)
Afrique subsaharienne 8.70 8.47 3 %
Asie de l’Est et Pacifique 36.29 34.38 5 %
Amérique latine et Caraïbes 31.21 28.73 8 %
Asie du Sud 12.7 10.07 21 %

Tableau 2a : Évolution (en %) de la médiane de l’indice général du Baromètre (1re et 3e édition) : Tous les pays

1re édition2013 3e édition 2105 Évolution (%)
Afrique subsaharienne 8.70 8.47 3 %
Asie de l’Est et Pacifique 21.29 21.16 3 %
Amérique latine et Caraïbes 28.96 28.73 1 %
Asie du Sud 12.70 10.07 21 %

Tableau 2b : Évolution (en %) de la médiane de l’indice général du Baromètre (1re et 3e édition) SANS LES PAYS À REVENU ÉLEVÉ

  • 3 Les initiatives relatives aux données ouvertes souffrent d’un manque d’engagement et de ressources sur le long terme, générant des bénéfices sur le court terme qui ne sont pas durables.

Les résultats des pays pour lesquels il y a eu une amélioration dans les indices généraux du Baromètre entre 2013 et 2015 masquent une tendance inquiétante : à l’exception de deux pays (le Cameroun et le Nigeria), les résultats de 2015 pour tous les pays étaient inférieurs aux résultats de 2014. La figure 2 montre que le Nigeria est le seul pays en Afrique pour lequel l’indice général de l’ODB a constamment augmenté. Seul le Cameroun a vu une nette amélioration entre 2013 et 2015, ainsi qu’une amélioration entre 2014 et 2015. Alors qu’il y a un déclin évident dans les résultats pour le Kenya et l’île Maurice entre 2013 et 2015, il y a un rétablissement des résultats généraux entre 2014 et 2015.

Figure 2 : Résultats généraux de l’ODB pour une sélection de pays africains, 2013-2015.

Les pics dans les résultats généraux du Baromètre mettent en évidence une tendance inquiétante : les améliorations dans la préparation et l’implémentation des données ouvertes dans de nombreux pays africains ont tendance à être des occurrences ponctuelles. Il existe plusieurs explications possibles :

  1. L’aide au développement est parachutée dans un pays pour des projets spécifiques avec des bénéfices à court terme uniquement ;
  2. Le soutien extérieur fourni aux gouvernements africains n’est pas aligné sur les besoins exprimés par les gouvernements africains ;
  3. Les gouvernements africains ne s’engagent pas en faveur des données ouvertes sur le long terme, et/ou ;
  4. Comme l’ont montré les recherches de la Web Foundation en Afrique du Sud et au Kenya, même si les engagements sont clairs au niveau des plus hautes instances du gouvernement, ils ne sont pas pour autant répercutés dans le fonctionnement des gouvernements en Afrique.

Des niveaux de coopération et de coordination plus élevés entre les gouvernements, les donateurs, les groupes de la société civile, les utilisateurs de données ouvertes et les intermédiaires sont nécessaires pour mettre en œuvre des initiatives durables ancrant l’utilisation des données ouvertes au sein des gouvernements et révélant à tous les acteurs leur intérêt.

Les niveaux relativement faibles d’implémentation des données ouvertes présentés dans la figure 3 semblent confirmer que le recours aux données ouvertes n’est pas une pratique ancrée dans les gouvernements africains.

  • 4 Les indices d’implémentation de l’ODB sont plus faibles que les indices de préparation et l’écart ne se réduit pas.

Figure 3 : Indices de préparation et d’implémentation du Baromètre des données ouvertes pour une sélection de pays africains, 2013-2015

La figure 3 montre les résultats du Baromètre concernant l’implémentation et la préparation pour les cinq premiers pays africains du classement 2015. Le Ghana est représenté pour montrer la baisse significative de son indice d’implémentation en 2015 qui mène à une chute de 24 places dans le classement mondial.

Trois phénomènes apparaissent clairement dans la figure 3. Le premier est l’écart constant entre la préparation et l’implémentation dans le cas du Kenya, de l’Afrique du Sud et de l’île Maurice. Pour ces trois pays, la préparation et l’implémentation sont clairement corrélées. Le deuxième est un écart qui se réduit entre la préparation et l’implémentation de manière évidente pour le Rwanda et le Nigeria.

Enfin, le troisième est une chute brutale pour l’implémentation des données ouvertes pour le Ghana qui présente une réduction de l’écart suite à une amélioration de l’implémentation en 2014, suivie par une chute catastrophique de son résultat d’implémentation en 2015 (voir figure 1).

Une analyse plus poussée des résultats du Baromètre pour le Rwanda et le Nigeria (voir figure 2) indique la détérioration de leur indice de préparation liée à des changements d’environnements politique et réglementaire. L’augmentation de l’indice d’implémentation est imputable à des projets d’implémentation couronnés de succès qui ont dopé les performances de ces deux pays depuis un niveau faible. Cela peut peut-être s’expliquer par le fait que ces initiatives s’appuient plus sur des projets que sur une approche programmatique et que ceux-ci sont moins sensibles au changement d’environnement politique. Le temps nous dira si des initiatives axées sur des projets peuvent avoir un impact durable générant de meilleurs indices d’implémentation dans les futures éditions du Baromètre. Il est cependant essentiel de résoudre les problèmes ayant une incidence sur l’implémentation des données ouvertes dans les pays africains. Comme l’indique le Rapport global du Baromètre des données ouvertes, les groupes de défense pour des données ouvertes doivent être plus attentifs aux contextes institutionnel et politique et devraient coordonner leurs efforts pour créer des environnements propices à leur travail.

L’exemple du Ghana: Durant la durée des recherches, le catalogue des données ouvertes du Ghana était en panne ou inaccessible pendant des périodes prolongées, et la plupart des jeux de données n’ont pas pu être localisés ailleurs sur les sites du gouvernement. L’impossibilité d’accéder aux bases de données gouvernementales a généré ce faible résultat d’implémentation en 2015, les données inaccessibles ne pouvant pas être évaluées. Il est possible que le Ghana préparait une restructuration complète de son portail de données. Dans ce cas, le pays pourrait retrouver sa position dans le haut du classement des pays africains. En fait, à l’heure de la rédaction de ce rapport, le portail était de nouveau accessible en ligne. Cependant, il est surprenant que lors de la période d’évaluation, aucune information n’était transmise quant aux raisons ou à la durée de l’indisponibilité des données. Cela entame sérieusement la confiance des utilisateurs envers le gouvernement comme source fiable de données et limite l’impact potentiel des données ouvertes gouvernementales.

L’exemple du Rwanda: La baisse de l’indice de préparation du Rwanda est le résultat des problèmes rencontrés dans la mise en place de sa relativement nouvelle loi relative à la liberté d’information et de problèmes liés à de mauvaises politiques de gestion de données (un nouvel indice de la 3e édition du Baromètre). La diminution était légèrement compensée par les améliorations dans d’autres domaines tels que le lancement d’une initiative sur les données ouvertes, les contrats avec les OSC et le soutien du gouvernement pour l’innovation. L’amélioration de son indice d’implémentation est le résultat de progrès particuliers effectués en relation avec les données relatives aux cartes, aux crimes et aux élections (particulièrement entre la première et la deuxième édition du Baromètre)

L’exemple du Nigeria: Le déclin de l’indice de préparation nigerian s’explique principalement par les mauvaises performances quant aux nouvelles politiques et à la gestion de données. L’amélioration dans l’implémentation est attribuable à deux jeux de données complètement ouverts concernant l’éducation et la santé publiés dans le cadre d’un projet spécifique : le Système d’Information MDG du Nigeria (NMIS) financé par le gouvernement

La figure 3 n’inclut pas les résultats pour la troisième composante du résultat final du Baromètre : l’impact des données ouvertes. La raison à cela est que seuls sept (33 %) pays africains ont restitué un résultat pour l’impact des données ouvertes (l’Afrique du Sud, le Kenya, le Rwanda, le Malawi, le Cameroun, le Ghana et le Nigeria), et seulement trois pays (14 %) ont obtenu un résultat supérieur à dix sur 100 (l’Afrique du Sud, le Kenya et le Rwanda).

  • 5Aucun pays ne se démarque en Afrique.

L’Afrique est la seule région sans champion évident en matière de données ouvertes. En Amérique latine, le Mexique, le Brésil et l’Uruguay se placent dans les 20 premiers au niveau mondial. Dans la zone Pacifique et Asie de l’Est, sept pays figurent parmi les 40 premiers du classement mondial, dont les Philippines, qui a gagné 17 places depuis la dernière édition du Baromètre. Dans les éditions précédentes, le Ghana et le Kenya semblaient pouvoir tenir ce rôle, mais les données montrent que la performance de ces pays est irrégulière. Les prétendants au trône libre se trouvent principalement en Afrique de l’Ouest – Burkina Faso, Sénégal et Nigeria – et le Rwanda est porte-drapeau pour l’Afrique de l’Est. Depuis la fin de la phase de recherche du Baromètre, le continent a connu des développements encourageants. Le Rwanda et la Tanzanie ont publié des propositions de politiques relatives aux données ouvertes afin de soumises aux commentaires du public. Il y a un solide soutien multipartite des données ouvertes au Burkina Faso, en Tanzanie et en Côte d’Ivoire, la dernière choisissant même les données ouvertes comme l’un des piliers de son programme national Partenariat pour un Gouvernement Ouvert (OGP) (Open Government Partnership, OGP). La Sierra Leone a désormais un conseil opérationnel des données ouvertes, en charge de l’implémentation de la Journée nationale des données ouvertes. Les adhésions à l’OGP en Afrique augmentent et le soutien institutionnel pour les données ouvertes au niveau du continent reste stable. Les prochaines éditions de ce Baromètre établiront si les performances de ces pays continueront de s’améliorer et si l’un d’entre eux émerge comme chef de file des données ouvertes dans la région.

Utiliser les données ouvertes pour vaincre Ebola

Dans les zones d’Afrique de l’Ouest affectée par l’épidémie d’Ebola, les routes, le nom des villages et les villages étaient absents de nombreuses cartes en ligne. OpenStreetMap (OSM), un outil de cartographie libre et participatif, a fourni des informations primordiales au Centre d’intervention contre Ebola de la Sierra Leone, au Humanitarian Data Exchange des Nations Unies, ainsi qu’à Ebola GeoNode pour les assister dans la coordination des interventions pour lutter contre l’épidémie. Cela démontre que fournir des données manquantes au format ouvert peut jouer un rôle important dans la lutte contre une épidémie aussi complexe qu’Ebola.

Utiliser des données budgétaires pour améliorer les programmes de bourses pour les enfants

En Afrique du Sud, les organismes de la société civile ont analysé le budget national et utilisé les données collectées pour faire campagne afin d’augmenter les soutiens aux enfants les plus pauvres du pays. Ils ont trouvé des financements supplémentaires et fait pression pour augmenter la limite d’âge. Le nombre d’enfants recevant des aides financières a quintuplé passant de 1,9 million à 11,1 millions en 13 ans. Les efforts de la société civile ont été facilités par le fait que l’Afrique du Sud est l’un des pays les plus transparents au monde en matière de budget.

Utiliser les données ouvertes pour réduire la corruption

Des preuves du conseil municipal de Vihiga ont mis en évidence des détournements de fonds considérables au Kenya. Cela a permis à la société civile d’intervenir avec succès en améliorant la responsabilité et la gestion des fonds publics via une supervision citoyenne. Le Centre for Law and Research International, en coopération avec une ONG locale (Community Engagement for Peace and Development) et avec le soutien financier du Partnership for Transparency Fund, ont eu un effet concret, réduisant la corruption de 20 % et augmentant le taux d’exécution des projets de 15 %.

Des médicaments moins chers pour les consommateurs

Code4SA a utilisé un jeu de données peu connu du site internet du Département de la Santé et l’a rendu accessible dans un format convivial qui permet aux patients de vérifier qu’ils ne sont pas surfacturés par leur pharmacie. Les patients obtiennent des médicaments à plus bas prix grâce à cet outil. Il a aussi eu des résultats inattendus. Il était attendu que les patients des classes moyennes à supérieures bénéficiant d’un meilleur accès à l’Internet tirent profit de cet outil. Il s’avère que les médecins l’utilisent également pour faire économiser de l’argent à leurs patients. Comme un médecin l’a déclaré : « C’est devenu rapidement un site Internet indispensable pour moi. Je travaille dans un quartier où les habitants ont des revenus différents et être capable de définir ce qui est possible avec le budget de mes patients est extrêmement utile – il n’y a aucun intérêt à prescrire un traitement que le patient ne peut pas se permettre. »

3 Conclusion

Les données ouvertes ne devraient pas être l’apanage des nations développées, ni le luxe des pays en développement. Les donateurs, la société civile et les gouvernements doivent travailler ensemble pour réduire la fracture numérique et s’assurer que les données gouvernementales sont des données ouvertes. L’héritage des données ouvertes ne doit pas être une ville fantôme de portails obsolètes, d’hackathons isolés, de formations poussiéreuses ou d’applications désertées. Pour voir un impact réel, les gouvernements doivent considérer l’adoption des données ouvertes comme un changement culturel et développer une culture dans laquelle elles sont la solution par défaut à long terme. Pour cela, les initiatives en faveur des données ouvertes reposant uniquement sur des donateurs et la participation aux efforts régionaux et mondiaux ne sont pas suffisantes. Il est nécessaire d’allouer des ressources et de mettre en œuvre des programmes incitatifs au sein des départements pour pour soutenir les engagements de haut-niveau.

L’African Data Consensus est un pas dans la bonne direction. Mais aucun pays africain n’a encore adopté l’International Open Data Charter. La charte fournit une opportunité pour les gouvernements africains de formaliser leurs engagements et de participer à une initiative mondiale qui se concentre exclusivement sur les données ouvertes.

La troisième édition du Baromètre des données ouvertes montre que certains pays africains soutiennent leurs engagements au niveau de l’implémentation. Le Rwanda et le Nigeria se distinguent à cet égard et il est possible que le Ghana, l’Afrique du Sud et l’Île Maurice inversent leur baisse de résultats en 2015 pour reprendre une tendance vers la mise à disposition et l’utilisation des données ouvertes. Il y a beaucoup de places pour que de nouveaux pays prêts à ouvrir leurs données gouvernementales comme le Burkina Faso, le Sénégal et le Bénin boostent leurs indices. Les éditions futures du Baromètre des données ouvertes seront essentielles pour confirmer les progrès et les tendances dans la mise à disposition et l’utilisation des données ouvertes sur le continent africain.

Nous avons besoin d’une prise de décision empirique s’appuyant sur des données pour améliorer la gouvernance et la productivité en Afrique.”

— Kofi Annan, s’adressant au Sommet sur l’enseignement supérieur en Afrique en 2015

4 Recommandations

Voici quatre recommandations pour améliorer la mise à disposition, l’implémentation et finalement l’impact des données ouvertes pour le développement. Ces recommandations reflètent celles du rapport mondial sur le Baromètre des données ouvertes et sont soutenues par les analyses et les conclusions partagées dans ce document.

  1. 1Soutenir l’International Open Data Charter.Pas un seul pays africain n’a signé la charte et il n’existe aucun champion clair en matière de données ouvertes à l’échelle nationale en Afrique. Tandis que l’Africa Data Consensus est reconnu comme un engagement novateur au niveau du continent, la charte maintiendra un dynamique politique en faveur des besoins au niveau mondial d’établir une aide solide et nette en matière de politique et d’aider les gouvernements à développer des plans à long terme pour établir les échéances, les ressources et responsabilités pour l’implémentation. Les pays africains signant la charte indiqueront aussi leur intention de jouer un rôle moteur dans l’implémentation des données ouvertes en Afrique.
  2. 2Étendre et approfondir les pratiques des données ouvertes.Notre analyse des pays africains a montré des pics dans les performances plus que des gains durables. Pour voir un impact réel, les gouvernements doivent considérer l’adoption des données ouvertes comme un changement culturel à long terme dans la gouvernance, en y dédiant les ressources économiques et humaines nécessaires, et s’assurer que l’infrastructure, les lois et les politiques permettent une implémentation des données ouvertes sur le long terme et l’obtention de résultats.
  3. 3Terminer le travail : s’assurer que les données gouvernementales publiées sont réellement ouvertes.Seuls deux des 10 % des jeux de données dans le monde viennent d’Afrique. Cela ne signifie pas que les gouvernements africains ne publient pas de données, mais ils doivent poursuivre avec l’attribution de la licence, la publication en masse et s’assurer que les données puissent être traitées par des ordinateurs pour être totalement ouvertes. Ce n’est que de cette manière qu’il sera possible de tirer pleinement profit des données.
  4. 4Harmoniser les efforts en matière de données ouvertes, de confidentialité et de liberté d’information. Dans plusieurs pays, il y a eu une diminution de l’indice de préparation pour les pays africains, en partie dû à des environnements réglementaires et législatifs en évolution. Les défenseurs des données ouvertes devraient travailler en plus étroite collaboration avec les militants pour la transparence, la confidentialité et le droit à l’information afin de parvenir à une meilleure compréhension mutuelle et à une meilleure coordination.